Mercredi 8 juillet

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Mercredi 8 juillet :

 

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Ilene Chaiken : «The L Word? Je suis en train d'écrire le film!»

 

INTERVIEW. Rencontre avec la créatrice de «The L Word», qui nous confie tous les secrets de la série: sa genèse, son écriture, son succès... Et aussi son avenir, à travers un film dont elle dévoile quelques aspects.

 

 

Aux Etats-Unis, d'aucunes l'ont surnommée «Mama Chaiken». En se retrouvant face à elle pour la première fois, on comprend pourquoi. Ilene Chaiken, la créatrice de The L Word, en impose avec son port de tête altier et son phrasé très «Reine Mère». Complètement mégalo pour certaines. Simplement consciente de son talent et de son statut de femme de pouvoir pour d'autres. Nous avons voulu en avoir le cœur net. Et se faire confirmer par elle qu'un film «The L Word» était bien en préparation... Rencontre exclusive.

Ilene, avant toute chose, racontez-nous la genèse de The L Word. Comment êtes-vous parvenue à imposer l'idée de cette série à la chaîne Showtime?
C'était une idée que j'avais depuis quelque temps déjà. En fait, il y a environ neuf ans, je me suis dit : pour changer, ce serait drôle de parler de quelque chose que je connais bien. J'avais le pitch de The L Word en tête et je suis allée voir les gens de Showtime parce que je les connaissais, que je travaillais déjà avec eux et que je les appréciais. Je leur ai demandé ce qu'ils pensaient de l'éventualité d'une série en prime time qui raconterait la vie de lesbiennes à L.A. Et là, ils m'ont ri au nez...

Pourquoi?
Mais parce qu'à cette époque-là, l'idée n'était même pas envisageable! Personne n'avait jamais songé à créer quelque chose de la sorte, et personne ne s'imaginait même qu'il y avait un public pour ça. Mais un an plus tard, je suis retournée les voir. Car entre temps, la chaîne avait racheté les droits de Queer as folk, la série anglaise, et l'avait adaptée avec succès. Alors je leur ai dit : est-ce que l'on n'essaierait pas de faire quelque chose pour les filles? Ils m'ont répondu : oui, pourquoi pas, allez, essayons!

Ensuite, comment avez-vous arrêté votre choix sur les actrices?
Le choix du casting n'est venu qu'en phase de production. Car d'abord, il a fallu que j'écrive le script, que la chaîne donne effectivement son feu vert, qu'elle commande le pilote pour que l'on puisse commencer le casting. On n'en était qu'au début, on regardait à droite à gauche, et j'ai dit à Showtime : écoutez, je vais essayer d'avoir une star. Eux m'ont rétorqué : ça nous étonnerait que tu arrives à avoir une vedette pour cette série-là! Je leur ai dit : laissez-moi essayer. Je suis allée trouver Jennifer Beals. Et Jennifer a tout de suite dit oui. Elle avait le désir de participer à un projet qui avait du sens. Elle souhaitait jouer un personnage avec lequel elle se sentirait à l'aise, mais elle a également répondu favorablement car les messages véhiculés par la série trouvaient un écho personnel en elle. A partir du moment où elle a dit oui, nous avons pu mener le reste du casting comme nous le souhaitions. Et au final, nous avons eu des actrices absolument incroyables.

Tout est donc parti de Jennifer Beals... Aujourd'hui encore, à titre personnel, elle semble très impliquée. À chaque fois qu'elle s'exprime à vos côtés, dans différentes manifestations LGBT, elle fait des discours très émouvants, elle apporte son soutien aux droits des gays.
Oui, c'est vrai. Elle a vraiment pris tout ça très à cœur car cela signifie beaucoup pour elle. Elle s'intéresse réellement à notre cause et elle a compris que son implication avait de l'importance aux yeux de beaucoup de personnes. Elle a pleinement embrassé cette relation privilégiée qu'elle entretient avec la communauté, et avec une telle grâce...

Pour quelle raison à votre avis ?
Parce qu'elle est qui elle est. En tant que métis, elle a grandi en ayant ce sentiment d'être une étrangère, en ayant l'impression de n'être représentée nulle part.

Puisque l'on en est à évoquer le casting : il y a une autre figure devenue elle aussi emblématique de l'univers L Word. C'est Katherine Moennig, qui campe Shane...
Kate a tout simplement été spectaculaire. Kate est une star d'une nature très particulière, elle est à part. Elle possède un charisme qui s'est révélé au travers de ce personnage. Et cela, c'était très excitant à voir. D'autant que, là aussi, cela a du sens. Parce qu'on n'avait jamais vu un tel personnage dans un divertissement populaire.

Quant à Jenny, est-il vrai qu'elle est le personnage qui vous ressemble le plus?Ne serait-ce que parce qu'elle est écrivain...
Au début, c'est vrai qu'elle était celle qui était le plus une partie de moi. D'une certaine manière, elle était mon alter ego. Mais, comme toutes les autres actrices avec leur personnage, Mia Kirshner s'est approprié son personnage et en a fait ce qu'elle voulait. Chaque actrice a fait de son personnage ce qu'il est devenu. Je ne dis pas que les personnages ont fini par se confondre avec les actrices, elles jouaient toutes clairement un rôle. Mais une alchimie s'est créée. Et Jenny est devenue quelqu'un d'autre.

Mais cela vous a plu que Jenny soit devenue le personnage que tout le monde aimait détester?
J'ai adoré ça! Je ne l'ai pas pris personnellement (sourire). Je ne me suis pas dit : mais c'est moi! Je pense vraiment qu'il était important d'avoir un personnage comme elle, qui ajoute encore un peu plus d'intérêt à la série, qui lui donne un peu plus de piquant. Et j'ai aimé le travail de Mia Kirshner qui, en plus d'être une excellente actrice, a été très courageuse, car elle a accepté de s'aventurer dans des secteurs où d'autres auraient rechigné à aller.

Pour parler de choses qui fâchent : vous savez que l'ultime saison a déçu certaines fans...
Il paraît...

Qu'est-ce que cela vous inspire ?
L'ultime saison ne comptait que huit épisodes et donc nous avons voulu faire quelque chose de différent, que la saison raconte une histoire en soi. Cela étant dit, bien sûr que j'ai entendu ça et là que des gens étaient déçus. Mais chaque saison, j'ai entendu ce genre de choses! Que parfois même certaines personnes étaient furieuses, alors que dans le même temps, j'entendais ou je lisais que d'autres adoraient... Je crois juste qu'il existe des gens qui par essence aiment être mécontents. Je pense d'ailleurs que c'est cela aussi qui a participé au succès de la série.

Au point d'ailleurs de devenir la série gay à la durée de vie la plus longue de toute l'histoire de la télévision...
Mais moi je ne vois pas The L Word comme une série «gay». Je l'envisage comme une série télévisée qui se trouve parler de personnes qui sont homosexuelles. Pour tout dire, plus que de me féliciter que ce soit un record pour Showtime, pour le câble ou pour que sais-je encore, je suis très fière qu'elle ait rencontré un tel succès six ans durant, car pour une série, c'est un exploit en soi que de durer aussi longtemps! Et puis, je ne pense pas que The L Word soit fini... Je pense qu'il peut y avoir un film, je pense que cela peut aller au-delà encore. Tous ces personnages vont continuer à vivre, j'en suis sûre.

Vous confirmez donc qu'il y aura un film?
J'y travaille, et j'ai bon espoir que cela se fasse, oui.

Vous y travaillez, concrètement, cela veut dire que...
Que je suis en train de l'écrire.

Et vous en avez parlé aux actrices ?
Oh oui! (sourire) Et elles sont partantes!

Ce sera pour quand ?
Je ne peux pas encore vous donner de date précise, mais j'ai bien envie de vous dire : pour un avenir assez proche.

Mais qu'allez-vous raconter dans le film? Quelle en sera l'histoire?
Je ne vais pas vous dévoiler l'histoire, mais juste vous dire ceci : le film The L Word sera l'essence même de The L Word. Cela parlera d'amour, de romantisme et d'amitié. Et comme il s'agit d'un film, la portée en sera plus grande que celle d'un épisode de série. Mais il sera toujours question de la même chose : le caractère universel de l'amour. Ce sera une comédie romantique ou une comédie dramatique, je ne suis pas encore arrêtée sur le genre du film précisément. Mais voilà, pour résumer : dans ce film, on parlera d'amour, d'amitié, de trahison... Mais surtout d'amour. De la vie, en somme.

Vous devez en revanche être déçue que le spin-off The Farm n'ait finalement pas été retenu?
Quand on me l'a annoncé, j'étais déçue, oui. Mais j'ai compris que cette décision ne venait pas du projet lui-même, qui a été bien reçu, mais plutôt du fait que Showtime avait des problèmes de planning, ou que la chaîne n'avait en fait pas les moyens de financer de nouveaux projets car tout le monde sait maintenant qu'elle avait commandé quatre pilotes et qu'elle n'en a retenu aucun. J'espère trouver une autre «maison» pour The Farm. Pour moi, ce projet est tellement connecté à The L Word... C'est une histoire que je voulais vraiment raconter. C'est pour cela que je vous dis que The L Word va continuer d'une manière ou d'une autre. Ça commencera par un film, peut-être l'internet, et ensuite, on verra.

Est-il difficile d'être, comme vous, une femme dans l'industrie du spectacle à Hollywood?
Je pense qu'il est difficile d'être une femme en général. Les femmes sont puissantes et très efficaces. Elles réalisent beaucoup de choses très significatives. Mais honnêtement, j'ai le sentiment d'avoir plus de choses à prouver parce que je suis une femme que parce que je suis gay. Il y a plus de misogynie que d'homophobie à Hollywood. Si vous regardez le nombre d'histoires qui ont par exemple été écrites sur des femmes, vous verrez qu'il y en a très, très peu. Et je ne parle pas juste des lesbiennes, mais des femmes en général. Personnellement, je prends ça comme un défi à relever.

Pensez-vous que des personnalités comme Portia de Rossi et Ellen DeGeneres, qui vivent de manière très ouverte, qui font la couverture des magazines people, peuvent aider à faire évoluer les mentalités ?
Ce que je pense, c'est qu'à chaque fois que quelqu'un est «out» et vit sa vie de manière très ouverte, cela aide. Bien entendu qu'Ellen DeGeneres est une personnalité extrêmement importante. Aux Etats-Unis, c'est un phénomène culturel, c'est une voix, beaucoup de gens l'adorent. Et cela aide bien plus à changer les cœurs et les mentalités que l'on ne se l'imagine.

Et vous-même, qui vivez en Californie, que pensez-vous du mariage entre personnes du même sexe?
Je pense qu'on va y arriver, que c'est inéluctable, que cela fait partie de la reconnaissance de nos droits, de l'égalité, et que nous allons finir par obtenir gain de cause, mais il y a encore du chemin, et c'est une bataille. Ce qui s'est passé en Californie l'année dernière avec la Proposition 8 était une énorme erreur et a fait beaucoup de mal.

L'élection de Barack Obama vous a-t-elle redonné espoir?
Oui, je nourris beaucoup d'espoirs. Mais pour ce qui est des droits civils des gays, il est encore en retard. Il y a même des Républicains plus à gauche que lui sur cette question, qui se sont mis en avant pour dire qu'ils soutenaient le mariage gay. Ce qu'Obama n'a pas encore fait. Je suis une immense supportrice d'Obama, j'ai fait partie du comité LGBT qui a mené campagne pour lui. Mais il n'est pas là pour nous pour le moment. J'espère qu'il va l'être dans le futur.

C'est important pour vous d'être impliquée politiquement maintenant que vous êtes une personnalité qui compte?
Personnellement, je suis une femme «politique», et cela a toujours été très important pour moi. Je fais ce qui me semble être bien et je pense en effet que le fait d'être une femme publique, d'avoir la possibilité de faire entendre ma voix, est un privilège et j'en use, mais avec beaucoup de précaution.

Vous pensez donc que le cinéma ou la télévision peuvent contribuer à changer le monde...
Oui, je le pense. Mais nous ne sommes pas là à nous le dire en permanence au moment où nous concevons des films ou des séries. Pour moi, ce qui compte c'est de raconter de bonnes histoires et de dépeindre nos vies telles qu'elles sont. Ma responsabilité en tant que réalisatrice, auteure ou productrice est de divertir les gens grâce à de bonnes histoires. En ce sens, pour moi, pouvoir faire The L word a été un réel privilège.





Commentaires

  • Océane

    J'adore tout ce qu'elle a dit =D
    Le film va être bien je lui fais totalement confiance !

    • ika

      Et dire que le coeur de notre petite kate est pris depuis pas longtems, elle a l'air mordue , snifff...